Les premières décisions arrivent et délimitent les notions de consommateurs et de professionnels des chevaux agissant dans le cadre de leurs activités commerciales (marchand, éleveur, instructeur).
Rappelons pour mémoire quelques principes simples, avant d’opérer un distinguo en fonction de la qualité du vendeur et celle de l’acheteur.
La vente en droit est définie comme l’accord au terme duquel l’un s’oblige à livrer une chose, et l’autre à la payer .La vente est parfaite dès lors que sont définis la chose et le prix, quoique la chose n’ait pas encore été livrée, ni le prix payé, ce qui est très important à rappeler et a des répercussions inévitables sur le transfert des risques de la chose vendue, entre le moment ou l’accord intervient et celui ou la chose est livrée.
Toujours en droit, les documents d’identification et la carte du propriétaire doivent êtres remis à l’acheteur dès avant le paiement. Le vendeur, de son côté, doit livrer la chose et la garantir. Mais la garantir de quoi ? C’est là que la directive Européenne change fondamentalement les rapports entre acheteurs et vendeurs.
Depuis 2002, la Cour de Cassation avait rappelle que, sauf convention contraire, seuls pouvaient invoqués comme vices cachés entrainant la résolution de la vente, les vices rédhibitoires limitativement énumérés par l’article R 213-1 du code rural. (Immobilité emphysème, cornage, fluxion etc.).
La directive Européenne vient d’ouvrir en grand les portes à n’importe quel recours, en énonçant de nouvelles dispositions applicables entre le vendeur agissant dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale, et l’acheteur en qualité de consommateur.
Ces dispositions sont applicables aux ventes d’animaux, et le vendeur est tenu de livrer un bien conforme au contrat, il répond entre outre de tous les défauts de conformité existant lors de la délivrance.
Autant de règles nouvelles à préciser mais aussi de définitions à rechercher, avant d’appliquer ces principes.
Qui sera un vendeur agissant dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale ? Les marchands de chevaux bien sur, mais aussi les éleveurs commercialisant leurs produits pourront éventuellement rentrer dans cette catégorie de professionnels.
Pour ce qui concerne l’acheteur (consommateur), devra –t-il être un simple amateur en opposition avec un amateur éclairé ? .Quelle sera la situation de ce consommateur s’il est conseillé par son moniteur ou son instructeur et quelle sera l’influence de la visite vétérinaire sur le sort des défauts de conformité ?
C’est là que la directive Européenne trouve son champ d’application par excellence. Le professionnel, marchand ou éleveur, doit garantir de la parfaite conformité de l’animal avec ce qui était énoncé ou attendu, objectivement et, ceci, pendant un délai de deux ans.
Quelle est, par ailleurs, la définition d’un défaut de conformité ? Vices rédhibitoires, vices cachés, impropriété à usage de toutes natures….rien n’est encore précisé.
Bien plus, le défaut de conformité n’est présumé pendant un délai de 6 mois, et l’acheteur n’aura pas à démontrer qu’il est préalable à la vente.
Pauvres marchands ! Pauvres éleveurs ! Il y aura lieu de s’entourer de précautions particulières pour éviter l’application de cette directive, car n’importe quelle vente pourrait être remise en cause après un long délai, ce qui méconnait la spécificité des ventes d’animaux
Dans cette catégorie peuvent figurer à priori, les ventes d’un marchand à un marchand. Dans ce cas, c’est la jurisprudence ancienne qui s’applique et le vendeur n’est tenu que des vices rédhibitoires, sauf convention contraire.
Plusieurs décisions récentes viennent de préciser ces notions et notamment un arrêt de la Courd’Appel de Limoges, en date du 09/08/2006.Dans cette espèce, les juges ont décidé que le professionnel est celui qui fait des actes de commerce c’est-à-dire celui qui tire des revenus de son activité.
A l’inverse, l’acheteuse qui propriétaire de sept chevaux montés par son fils, et qui se présente comme professionnelle, la Cour a néanmoins reconnu à cette dernière la qualité de consommatrice, en ce que le cheval a été acheté pour ses besoins personnels, en particulier ceux de son fils, et non pour les besoins d’une activité professionnelle, dont elle tirerait d’éventuels revenus.
La Cour d’Appel de Limoges écarte donc la notion d’amateur éclairé et retient celle plus économique de revenus marchands, tirés d’une activité habituelle de vente.
En revanche le tribunal d’Instance de Vierzon s’attache à rechercher uniquement la qualité formelle du vendeur sans interférence de la notion économique.
Le droit de la vente est donc loin d’être simplifié par cette directive Européenne qui institue une dualité ambiguë dont les contours seront changeants en fonction des uns et des autres, mais aussi en fonction des intermédiaires agissant dans le cadre de la vente.
L’acheteur a fait l’acquisition d’un cheval de compétition pour 190 000 €. L’animal se trouve être atteint d’une boiterie due à une arthropathie. L’acheteur engage alors une action afin de faire prononcer la résolution de la vente.
Le Tribunal de Grande Instance de Guéret a dit que l’article L 213-1 du code rural n’exclut pas l’application des articles
L 211-1 et suivant du code de la consommation, tels qu’institués par l’ordonnance du 17 /02/ 2005.Il a été également constaté que la vente était intervenue ente les vendeurs professionnels et un consommateur, et dit, que les dispositions du code de la consommation étaient applicables et, a, pour finir, ordonné une expertise. Les vendeurs font appel de ce jugement en contestant notamment que l’acheteur a la qualite de consommateur au sens des dispositions du code de la consommation.
Le consommateur, au sens de l’article L 211-3 du code de la consommation, est l’acheteur qui s’achète le bien pour ses besoins personnel, ou ceux des personnes à sa charge, et non pour l’exercice de sa profession. Le fait que l’acquéreur aurait acheté aux vendeurs plusieurs chevaux destinés à la compétition et revendiquait une certaine compétence en la matière, n’implique nullement que ces acquisitions étaient destinées à l’usage de sa profession. En effet, il ne résulte pas, des pièces versées aux débats par les appelants, que l’acheteur consacre une activité significative aux courses de chevaux ou de compétition, et en tire un revenu.
Le code de la consommation est donc bien applicable en l’espèce.
L’acheteur soutient que le cheval présente une boiterie et une arthropathie qui le rendent impropre aux concours de saut d’obstacles de haut niveau dont il ressort clairement de l’acte de vente que c’était l’usage auquel il était destiné.
La recevabilité de la demande ne fait pas de difficulté au vu des certificats médicaux produits
-Tribunal d’Instance de Vierzon :16/02/2007
A la suite d‘une annonce, l’acheteuse fait l’acquisition d’un cheval de compétition pour la somme de 5850 €.
L’animal est rapidement apparu inapte au service duquel il était destiné, car il souffrait d’une fibrillation auriculaire lui interdisant toute compétition
L’article L 211-5 du Code de la Consommation (décret du 17 /02/2005 transposant en droit interne la directive européenne du 25/05/1999) dispose, que le vendeur agissant dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale, est tenu de livrer un bien conforme au contrat et répond des défauts de conformité existant lors de la délivrance.
Selon l’article L 211-5 pour être conforme au contrat, le bien doit :
1 être propre à l’usage habituellement attendu d’un bien semblable, le cas échéant (…) présenter les qualités qu’un acheteur peut légitimement attendre eu égard aux déclarations publiques faites par le vendeur, notamment dans la publicité ;
2. ou présenter les caractéristiques définies d’un commun accord par les parties, ou être propre à tout usage spécial recherché par l’acheteur, porté à la connaissance du vendeur et que ce dernier a accepté.
Enfin aux termes des dispositions de l’article L211-7, les défauts de conformité qui apparaissent dans un délai de six mois à partir de la délivrance du bien sont présumés exister au moment de la délivrance sauf preuve contraire.
En l’occurrence et d’une part Madame C se présente sur la déclaration de vente du 12/10/2005 comme instructeur d’équitation diplômé d’Etat ,et auteur d’ouvrages techniques ,et est la gérante d’une EURL exerçant l’activité d’achat et vente d’articles et d’équipements se
rapportant à l’équitation (…) ,la location de matériel dans ce domaine ,l’étude ,la conception et la fabrication de matériel dans ce domaine « depuis le 22/09/2005.
De plus elle préside une association de formation aux activités équestres ainsi que cela résulte de la « Déclaration de changement de personnes chargées de l’administration ou de la direction d’une association »adressée à la sous –Préfecture de Vierzon le 10/05/2003
L’ensemble de ces éléments conduit à considérer que Madame C est un vendeur agissant dans le cadre de son activité professionnelle au sens de l’article précité.
D’autre part, il est établi que la jument en ce qu’elle souffre d’une fibrillation auriculaire avec un pronostic défavorable, ne présente pas les qualités auxquelles Madame R pouvait légitimement s’attendre au vu des déclarations de Madame C, dans le cadre de l’annonce publiée avec les mentions « CSO-idéale amateur pour débuter compétition »
Enfin, le diagnostic de cette maladie a été fait moins de cinq mois après la vente, de sorte qu’elle est présumée avoir existé au moment de la délivrance du 12/11/2005.
Le fait que la jument ait participé à six compétitions ne saurait combattre cette présomption, ce d’autant plus que les résultats obtenus sont médiocres voire nuls (trois forfaits, 5 ème sur 6